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Filippo en plein effort et bien entouré

Que dire d’un marathon ? La plupart d’entre vous connaissez sans doute la fameuse histoire du messager grec Philipidès.

A mes yeux, le marathon est une épreuve mythique, une distance difficile à maîtriser, un équilibre subtil entre vitesse et endurance.

Le déficit en glycogène, le fameux mur, des défaillances fulgurantes arrivant même aux meilleurs de la discipline, tout cela contribue à la légende du MARATHON.

Cette distance (qui couronne l’athlète le plus endurant et fort mentalement) et le 100m (qui couronne l’athlète le plus rapide) sont d’ailleurs les 2 épreuves les plus attendues lors des Championnats du monde et même des JO.

Je vous laisse à présent découvrir un magnifique récit relatant les belles aventures d’un formidable athlète persévérant et méritant, Filippo Pisano.

 

Stephane Heiniger

 

 

 

« Le début d’une histoire ce n’est jamais le début.

Le début commence toujours bien à l’avance de ce qu’il est possible d’observer. »

 

Pour atteindre un objectif vous n’avez pas besoin que du talent, la part d’abnégation, de persévérance, de force mentale, de rigueur physique et psychologique, la volonté de se surpasser et d’assumer la défaite sont des éléments tout aussi importants que le talent.

A parité de talent ce qui fera la différence ça ne sera pas le talent que vous avez mais la rage de vous surpasser, de vous découvrir et de vous émerveiller de vos possibilités.

 

Il y a maintenant deux semaines que j’ai fini mon troisième marathon sur route et le temps est venu de faire une introspection de cette dernière aventure de l’année 2020.

 

Je vous préviens, ça ne va pas être court, soit vous zappez, soit installez-vous confortablement.

Les morceaux de musique qui raisonnaient dans ma tête le jour de la course m’ont accompagné pour l’écriture de ce récit, je vous les dévoile.

Ludovico Einaudi, Lady Labyrinth, puis poursuivez avec Nightbook 1, au royal Albert de Londres, vous devriez trouver ca sur YouTube.

Bonne lecture.

 

Filippo Pisano

 

 

5 novembre 2017

 

« Je lève les yeux au ciel et mon regard est capté par les feuilles rouges qui virevoltent dans le ciel brumeux de cette matinée Newyorkaise, la pluie tombe en fines gouttelettes depuis une heure déjà et il ne fais pas trop chaud pour courir en liquette.

Ça fait un moment que suis en train de souffrir, on m’avait parlé du mur du 37éme mais à partir du 25éme kilomètre mes jambes ont commencé à se durcir.

Suis entouré par d’autres coureurs mais mon esprit n’aperçoit plus la réalité de la même manière, les images m’apparaissent de manière ouatée, les sons aussi me parviennent en deuxième plan.

Aux alentours du 38éme kilomètre j’entends un son familier parmi la cacophonie de cette course, je reconnais la voix d’Elodie qui m’encourage, je ne sais pas ce qu’elle fait là, elle non plus, me dira le soir s’être perdue et qu’en sortant du métro à ce moment-là avait jeté un coup d’œil à la course avant de reprendre le bon métro et m’avait vu pile au moment où je passais, une chance sur 55000, le destin parfois..

Je bataillais dur avec ces jambes qui me faisaient tellement mal et qui disaient à mon esprit d’en arrêter là, que ça suffisait, qu’elles avaient bien donné, qu’elles feraient mieux la prochaine fois, mais je n’étais pas d’accord.

J’ai couru au mieux que je pouvais, je courais et je pleurais, d’émotion, de rage, de bonheur, de déception mais conscient que j’avais la chance de vivre ces moments.

Le temps final de ce premier marathon a été bien au-deçà de mes espérances et de l’objectif que je m’étais fixé, sous les 3 heures, j’ai fini en 3h10’41’’ dans une grande souffrance.

Conscient d’avoir donné le meilleur de moi-même mais aussi déçu du résultat car j’avais travaillé dur pour atteindre mon objectif, cette course m’a permis d’acquérir une bonne base d’expérience pour la suite, je savais qu’il fallait faire preuve de résilience.

Je me suis promis que je passerais sous les 3 heures, j’avais appris qu’un marathon demande d’autres aptitudes qu’une course en montagne, mais que les difficultés sont autant d’opportunités que l’on peut saisir pour s’améliorer, à nous de s’en emparer.

 

La Ville lumière

 

‘’Si vous avez peur de perdre vous ne sortirez jamais gagnants, mais c’est cette même peur de perdre qui fera de vous un gagnant’’

Le départ de cette course fût donné sur les Champs-Elysées divisées en deux par une file interminable de véhicules blancs de la police de sûreté, les manifestations des gilets jaunes font rage ce printemps 2019 en toute la France métropolitaine.

On n’a pas eu de chance à ce coup-ci, avec Odile on s’est retrouvées coincées dans la mauvaise partie des Champs, le bloc de l’autre côté s’ouvre avant le nôtre et défile devant nous qui sommes impatients de prendre le départ, quelque milliers de coureurs après.

 

Un marathon c’est un voyage introspectif qui met à nu nos ressources ancestrales.

 

La boule au ventre je me suis lancé dans ce deuxième marathon pour trouver les réponses à mes questions, j’avais peur de souffrir à nouveau le martyre de New-York, ça faisait 12-15 ans que je n’avais plus enduré autant.

Ma détermination devait faire face à la peur de l’inconnu, de la gestion de course, la durée de celle-ci de mon manque d’expérience objectif dans ce domaine.

Parti prudemment, l’esprit blessé par mon expérience précédente, je voyais les kilomètres défiler en attendant le coup de mou que je redoutais et que je connaissais si bien.

A la mi-course je fais un premier ‘’état des lieux’’ et je constate que je suis en bonne forme, le plus dur reste à venir, sur un marathon la course commence véritablement autour du kilomètre 30.

Dans la deuxième partie du marathon de Paris le parcours devient sinueux avec pas mal de petites montées et descentes, puis des faux-plats dans les bois de Boulogne, faut rester concentré pour ne pas sortir de sa bulle car les jambes perdent vite leurs repères.

34, 35, 36, 38éme km je me dis que je suis bien, que ça peut le faire, que je suis dans les temps mais qu’il ne faut pas se réjouir trop tôt, que ça peut se compliquer a tout moment, sois prudent..

Quand je vois l’arche de l’arrivée je comprends que ça ne le ferait pas, mon GPS affiche 42.195 m pour moins de trois heures mais il me reste encore un peu plus de 100 mètres à parcourir.

J’étais en colère avec moi-même pour n’avoir pas réfléchi davantage, ne pas avoir pris un peu de marge vu qu’on risque facilement de parcourir plus de mètres que le parcours ne l’indique car faut slalomer entre les coureurs partis avant soi.

Si l’inexpérience risque de nous faire commettre des erreurs une analyse de ceux-ci s’avère toujours constructive pour les métaboliser et les transformer en forces sur lesquelles s’appuyer pour ses prochaines épreuves.

 

3h 00’23’’, seulement ou de trop ?

Un pas à la fois, je crois fortement dans la persévérance..

Face à moi-même je savais que je n’avais pas atteint mon objectif, qu’en quelque sorte j’avais perdu, bien que je ne crois pas dans l’échec, je pouvais aussi être heureux de ce que j’avais appris, je savais que mon objectif était atteignable, que ce que j’avais visé n’était pas irréaliste.

Apprendre de ses expériences..

 

 

Jeudi soir 19:05, -62 heures du départ

 

« Après concertation [..] la décision a hélas été prise d’annuler le Lausanne Marathon 2020, en raison de l’évolution de la pandémie. »

Pas facile d’accepter cette décision a moins de trois jours du départ, surtout si l’on sait le travail et le temps que cela demande de préparer un marathon.

 

Dans la difficulté se cache toujours une opportunité

Il ne fallait pas laisser passer cette occasion, il fallait saisir cette opportunité, never stop exploring..

 

Rendez-vous dimanche matin 25 octobre à 09:00 pour vivre un nouveau chapitre de cette aventure..

Plusieurs semaines à l’avance j’avais pris l’engagement avec moi de changer mon approche psychologique a cette course, de ne pas la subir mentalement, de la respecter mais d’y aller avec la conscience que tout était possible dans le meilleur comme pour le pire, que j’accepterais son issue.

Je devais changer ce qui m’empêchait d’être libre mentalement, de chasser tout ce qui pouvait avoir un impact négatif sur le moment, je devais me focaliser seulement sur l’instant présent, respirer, avancer, se relaxer, faire le vide dans son esprit, être à 100% dans le moment présent, essence de la vie.

Telle une bulle qui m’entoure je ne laisse rien entrer qui pourrait me perturber ; la crainte, l’insécurité, le doute, la peur.

C’est la magie du sport comme forme d’art, de la création dans n’importe quel domaine d’application, être dans l’instant présent, pleinement.

Suis parti pour mieux revenir, conscient que j’allais abandonner une ancienne partie de moi pour en découvrir une nouvelle, une texte de Reinhold Messner, premier alpiniste à avoir gravi les 14 sommets au monde de plus de 8000 m sans oxygène, se fait brèche dans mon esprit : « Plus je montais haut dans la montagne et plus je descendais au fond de moi-même ».

C’était assez étrange de partir sans savoir ou j’allais, si je tiendrais 10, 20, 30 km ou moins, je ne m’y intéressais pas ce matin-là, tout ce que je devais faire c’était respirer et avancer.

Grandson-Cheyres aller-retour peut vous offrir de belles possibilités de jeu, d’exploration et d’introspection si vous le souhaitez, ça ne tient qu’à vous..

Au début du deuxième passage sur le chemin des grèves les voyants sont au vert, je suis en pleine forme, encore facile mais ‘’le mur’’ est sournois, faut se gaffer et rester à l’écoute de soi.

Trois ans plus tard et plusieurs milliers de kilomètres après avoir franchi la ligne d’arrivée au cœur de Central Park j’ai pu tenir ma promesse.

J’ai terminé mon troisième marathon sur route en 2h 55’ 10’’

 

Remerciements

 

Ça n’a pas été facile de se recentrer a trois jour du départ, se donner un nouvel objectif en si peu de temps, courir un marathon sans l’adrénaline de la compétition c’est beaucoup plus engageant mentalement mais j’étais parfaitement entouré.

Merci à Gilles Vaucher de m’avoir accompagné pendant les dix premiers kilomètres en courant et les cinq derniers à vélo, ta compagnie et soutien m’ont fait grand plaisir.

Merci  à Valerie et Bastien pour votre amitié, de m’avoir suivi sur presque un tiers du parcours à vélo, je n’ai pas eu encore l’occasion de vous remercier personnellement, votre présence m’a donné du courage.

 

Merci à la famille d’Odile venue nous encourager le long du parcours, même si pour Odile ce ne l’a pas fait ce jour-là sache que je crois fortement en toi, je serais très heureux de partager avec toi le jour où tu passeras cette fameuse barre des trois heures sur marathon, quand tu n’y crois pas assez fort sache que j’y crois pour deux.

Merci à tous les amis de l’USY pour les messages le matin du départ, on aurait aimé vous inviter à partager ce moment avec nous mais les contraintes dues aux rassemblements ne nous ont empêché, ça seras pour une prochaine fois.

 

Merci à Stéphane et Elodie, si je n’avais pu choisir que deux personnes pour m’accompagner ce jour-là j’aurais choisi vous, je suis reconnaissant de la chance que j’ai.

Vous êtes les deux témoins les plus directs de cette évolution, sans vous je ne sais pas si cela aurait été possible, en tout cas beaucoup moins agréable.

 

Stéphane ; merci d’avoir couru ces 42 km avec moi, ce n’était pas prévu ainsi mais ta compagnie et ton soutien ont rendu tout beaucoup plus facile.

On a partagé tous les entrainements les plus durs, chacun a son rythme, puisque donner le meilleur de nous-même nous unit, on a vécu beaucoup d’aventures à travers le monde, que cette belle histoire puisse continuer, merci pour ton professionnalisme et sérieux, il y a peu de personnes qui gagnent ma confiance totale, tu en fais partie.

Elodie ; merci pour ton soutien et ravitaillements roulants tout au long de ce périple, ta présence était escompté pour moi mais je te remercie du fond du cœur pour ta générosité, tes massages, ta patience, d’être celle que tu es.

Quand j’ai mal je cours plus fort, c’est ma manière de te remercier pour tes efforts.

Merci à toutes et tous qui par leur travail m’ont aidé à soigner mes bobos et pouvoir poursuivre ce cheminement pour arriver prêt le jour du départ, ce qui est déjà une victoire en soi ne l’oubliez pas.

 

Peu importe l’objectif ou le rêve que vous avez, sachez le faire grandir, gardez l’espoir qu’en y croyant de tout votre être celui-ci finira par se réaliser mais il faut être prêt à suer, à avoir le goût du sang dans la bouche, à sortir s’entrainer à 22 heures en se levant à 4 heures du matin, à vous perdre dans le brouillard, dans la nuit, à trembler de froid, à sortir par 40 degrés.

Que vous réalisez une performance ou que vous ayez atteint un but particulier dans la vie ou dans le sport, ce ne sont pas ceux-ci qui feront de vous une personne meilleure

Ce qui fait de vous une personne meilleure c’est la puissance de vos rêves et le travail que vous fournissez pour les réaliser.

Ne rêvez pas les yeux fermées, inspirez, relaxez-vous, ouvrez les yeux et..partez..

 

Bon voyage.

 

Filippo

 

« Soyez bienveillants avec les humains, les animaux et la terre qui nous habite »

 

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